(A) la prose
- auteur: Philippe de Vigneulles (1471-1527/1528) [de son vrai nom, Philippe Geraird; il donne dans sa prose des indications sur son identité et ses coordonnées, notamment: «je, Philippe de Vignuelle, le mairchamps demorant audit Mets, derrier’ Sainct-Salvour, sus la rue des Bons Anffans» (épilogue de Hervis, v f. 59r)]
- dédicataire: non mentionné (cf. infra,organisation du texte)
- datation: Philippe a travaillé en deux étapes: il s’est d’abord attaché aux poèmes de Hervis de Metz, Garin le Loherain, Gerbert de Metz, dans les années 1514-1515. Philippe a ensuite repris son travail lorsqu’il a fini, non sans mal, par mettre la main sur une version d’Yonnet perdue pour nous. Il semble qu’il n’ait jamais cessé de travailler la formulation de détail de sa prose jusqu’à sa mort (1527 ou 1528).
- Doutrepont 1939, pp. 152-158
- deux manuscrits:
(1)v (sigle de Vietor). Disparu, figurait sous le n. 847 (anc. 97) parmi les manuscrits de la BM de Metz
(2)h (sigle de Herbin).
- organisation du texte
Le travail de mise en prose est doté d’un Prologue général.
Philippe de Vigneulles ne connaît ou ne retient que la Geste des Loherains «au sens restreint» (cf. J.-C. Herbin, «Variations, vie et mort des Loherains... », pp. 147-174, en partic. pp. 147-151): il ne translate donc que Hervis de Metz, Garin le Loherain, Gerbert de Metz, Yonnet de Metz, mais ignore totalement la Vengeance Fromondin et Anseÿs de Gascogne (autrefois Anseÿs de Metz).
On peut reconstituer les deux étapes de son travail(voir plus haut, datation). Philippe de Vigneulles nommait la partie correspondant à la première étape Le Lourrain Guerin (cf. Epilogue de Hervis de Metz, v f. 59v; voir aussi f. 11v). Mais il a varié dans sa conception de la Geste des Loherains. A la fin du Prologue d’Yonnet de Metz, Philippe de Vigneulles confirme qu’il range Yonnet à part de ce qu’il appelle Le Lorrain Guerrin. Cependant, le Prologue d’Yonnet, en référence à la première étape de la mise en prose, paraît mettre aussi à part, d’emblée, le poème de Hervis de Metz. Alors qu’à la fin d’Yonnet, Philippe de Vigneulles englobe les deux étapes de son travail sous le titre global Le Lorrain Guerrin.
Le texte présente globalement une double structuration en livres et en chapitres. Un Prologue général ouvre le volume (h pp. 5-6 = v f. 1r-v). La première unité correspond à la mise en prose du poème de Hervis de Metz (h pp. 7-269 = v ff. 1v-59v + 8 bis): «Icy devant est finee la vie et histoire du duc Pierre de Lourraine et de Aelis sa fille, pareillement de la belle Beautris, fille a Eustaiche le roy de Thir, et seur au roy Fleur de Honguerie, et du noble duc Hervey de Mets son bon mary», hp. 268). Philippe scande ensuite sa prose de repères bien visibles pour Garin le Loherain et Gerbert de Metz (Garin I h pp. 269-572 = v ff. 60r-145r; Garin II h pp. 573-733 = v ff. 145v-189r; Garin III h pp. 734-1149 =v ff. 189r-305r): «Cy fine le premier livre du Lourain Guerin de Mets et de son frere le duc Baigue de Bellin» (v f. 145r, page manquante dans h entre 572 et 573, mais cet épilogue est reproduit par la publication de 1901, p. 43); «Icy accommence le second livre du Lorrain Guerrin» (rubrique initiale de Garin II, h p. 573), «Icy fault le second livre du vertuelx et puissant prince le Loherains Guerin et du tres vaillant et noble duc le duc Baigue de Bellin...» (fin de Garin II, hp. 733); «Ycy commence le thier livre du noble et vaillant prince le Lorrain Guerrin…» (début de Garin III, h p. 735); cf. encore «le livre ancien qui de ceste histoire est faict, nommez le Lorrain Guerrin de Mets qui est en rime ancienne, comme dit est, et duquel j’ay extraict cestui presant...» (fin de Garin III, h p. 1149). Suit Yonnet de Metz (h pp. 1150-1219 = v ff. 305r-313v pour la partie d’origine conservée).
Quant au mot «chapitre», il se rencontre régulièrement sous la plume de Philippe de Vigneulles (voir plus haut, description de v). Dans le manuscrit h, chaque chapitre est constitué d’un paragraphe unique, quelle que soit la longueur du texte retenu pour cette unité narrative. Une numérotation ancienne en chiffres arabes dans la marge accompagne chaque rubrique, reprenant à 1 à chaque ouverture de nouvelle partie (Hervis de Metz, Garin I, Garin II, etc.).
Partie prenante du contenu, Philippe intervient sans cesse dans le récit pour expliquer, mais surtout pour donner son avis et afficher ses préférences (qui vont systématiquement aux Lorrains...). La mise en prose de Philippe de Vigneulles est plus qu’aucune autre un dérimage qui, la plupart du temps, suit pas à pas le texte, au point qu’on peut l’utiliser pour conforter, éclairer, voire corriger le texte en vers. Le translateur affiche un souci quasi obsessionnel de brièveté et tente de l’atteindre en essayant de résumer les discours directs.